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D-025-001 - NOTES - Classeur D - Fonds d'archives Baulin

D-025-001

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  • Des interviews exclusives de Dja-Apharou ISSA IBRAHIM, ami et confident de Jacques Baulin, responsable par donation de l’intégralité des documents constituant le fond, et président de l’association sont actuellement publiées dans la rubrique présentation.

  • Les trois ouvrages de J. Baulin : Conseiller du président Diori, La politique africaine d’Houphouët-Boigny et La politique intérieure d’Houphouët-Boigny
    seront disponibles sur le site en version iBook et en version Pdf dès septembre
    2009.
















Le 14 Novembre 1969


S.E. Monsieur Houphouet Boigny
Président de la République
Abidjan


Monsieur le président,


Au moment de la diffusion de tract contre Bédié, Kessé est venu me voir pour m’informer que vous m’accusiez d’en être l’auteur. J’ai été alors sincèrement ulcéré que vous puissiez me croire capable d’une telle action, alors que six années durant j’avais oeuvré pour vous dans l’ombre, mettant à votre service mon enthousiasme, ma loyauté, mon ardeur au travail, mon dynamisme et mon intelligence. Permettez-moi de rappeler ici que vous êtes tellement avare de compliments, cous aviez, à plus d’une reprise, rendu hommage alors, même par écrit, à mes activités au service de la Côte d’Ivoire.


Dans ce contexte, je pensais qu’une simple mise au point de ma part suffirait à dissiper les nuages. C’est pourquoi je vous avais écrit immédiatement une lettre personnelle vous affirmant, sur l’honneur, n’avoir eu vent du tract que quand il m’est parvenu.


Quelques semaines plus tard, on me rapportait que vous étiez toujours convaincu que j’en étais l’auteur. Je vous écrivais alors pour la seconde fois pour démentir ces allégations calomnieuses. Hélas ! sans plus de succès.


Il y eut ensuite deux ou trois phrases d’un article de Gilbert Comte paru dans "Le Mois en Afrique". Une fois de plus, vous avez cru que j’en étais l’auteur, du moins l’inspirateur. Le coup de téléphone de Kessé à Comte - qui a été considéré comme une insulte par ce dernier - et les explications données par le journaliste ainsi que son démenti formel ne paraissent pas vous avoir convaincu non plus.


Et maintenant c’est l’affaire de l’article de Gilbert Compte paru dans "Le Monde" daté du 12 novembre. là aussi, vous croyez que j’en suis l’auteur, seule étant Gilbert Comte.


Je regrette infiniment que telle soit votre conviction dans toutes ces affaires de presse. Je le regrette,


1°. pour Gilbert Comte car cela constitue une atteinte à son honneur de journaliste et d’homme,


2°. pour moi, que vous considérez sans doute comme un personnage vil pouvant s’abaisser à ce genre d’action contre vous,


3°. pour vous même, Monsieur le Président, car considérer une critique faite en conscience par un journaliste ami de la Côte d’Ivoire comme une oeuvre malintentionnée, signifie que vous sous-estimez à nouveau l’importance de la presse, négligée, sciemment, par vous, depuis trois ans, en dépit de mes objurgations.


Si j’avais eu le sentiment que vous attachiez une quelconque valeur à mon honneur, je vous aurais une fois de plus, donné ma parole d’honneur que je n’y suis ABSOLUMENT pour rien dans ces actions de presse. Hélas ! mes deux affirmations précédentes sur l’honneur, et surtout le fait que vous ayez mis en doute mon honnêteté, en décembre dernier, lors de l’affaire du blé, en dépit du serment terrible que je vous avais fait spontanément trois ans auparavant, m’amènent à m’abstenir de tout nouveau serment.


c’est pourquoi je préfère recourir à la logique pour essayer de vous démontrer que je ne peux pas être à l’origine de ces écrits critiques. En effet, si dans l’absolu, il est éminemment flatteur pour moi que vous me croyiez capable de diriger à la baguette la presse française - et aussi, pourquoi pas, l’étrangère puisque j’ai une centaine de très bons amis journalistes bien placés en Europe et au Etat-Unis - il me serait IMPOSSIBLE, même si je le voulais, de les pousser à attaquer la Côte d’Ivoire. Si je le faisais, je perdrais mon crédit auprès des journalistes qui m’honorent de leur amitié parce qu’ils trouveraient méprisable que j’avilisse un pays et un chef d’Etat que je déifiais il y a guère.


Et c’est dans ce contexte que j’ai été amené à ME BATTRE PIED A PIED avec certains journalistes pour les convaincre de ne pas ébruiter, dans la presse européenne, l’affaire Bédié : ils peuvent en témoigner ; ils ont accepté, jusqu’à ce jour, de taire ce scandale, UNIQUEMENT pour m’être agréables. Je n’ai pas demandé de satisfécit pour cette action au service de la Côte d’Ivoire ; mais je suis en droit, me semble-t-il, de demander tout au moins qu’on cesse de ma calomnier.


Mais les calomnies dont je suis l’objet ne se limitent pas à la presse. On me rapporte en effet que mes calomniateurs vous ont amené à croire que je suis l’instigateur des manifestations d’étudiants ivoiriens à Paris et même, paraît-il, à Abidjan. J’apprends enfin que sur la base d’informations provenant des mêmes sources, vous m’accusez nommément d’avoir poussé le Président Diori à entreprendre sa tournée en Asie. Il pourra vous certifier, lui même, que deux mois durant, et jusqu’à la veille même de son voyage, j’ai essayé de l’en dissuader, au risque de l’indisposer à mon égard.


Tout cela, Monsieur le Président, prouve à l’évidence une chose : je pense - je vous l’avais déjà dit lors de nos discussions orageuses d’avril dernier, avant que je ne démissionne - que certaines personnes de votre entourage ont intérêt à vous empoisonner l’esprit, par des ragots et des calomnies. Cet intérêt malsain n’a rien à voir avec vos intérêts, ni ceux de la Côte d’Ivoire ou l’Afrique. Rappelez-vous, Monsieur le Président qu’après le complot d’août 1963, nombreux individus qui venait vous voir pour dénoncer des complots imaginaires, ou régler des comptes personnels avec certains hommes en place : Rappelez-vous aussi que mois après mois, je vous demandais à l’époque de n’attacher aucune importance à ces dénonciations intéressées dont le but unique était de vous réduire à la défensive, de vous isoler, donc de vous affaiblir en Côte d’Ivoire et en Afrique.


Aujourd’hui comme hier, des gens cherchent à vous induire en erreur, à vous utiliser pour des desseins qui ne sont pas, qui ne peuvent être ceux d’Houphouet.


Quant à moi, le Président Diori et son entourage, ainsi que les journalistes amis, peuvent témoigner que ma position, à l’heure actuelle, est la suivante : faire l’impossible pour préserver intact le prestige du Président Houphouet sous peine de voir les racistes d’Europe et d’ailleurs pavoiser. Je suis convaincu en effet, et tous ceux qui me connaissent et ont des contacts avec moi peuvent en porter témoignage, je pense aujourd’hui comme hier que le succès de l’Afrique dans sa lutte contre le sous-développement passe par le succès d’Houphouet en Côte d’Ivoire.


Et si je viens par la présente vous prier instamment de prendre en considération les arguments ci-dessus tendant à vous prouver que je suis victime de calomniateurs, croyez bien que c’est dans votre intérêt que je le fais. Car une analyse objective froide, des preuves et des témoignages irréfutables fournis ci dessus, devrait vous amener à mettre en doute la bonne fois de ceux qui vous rapportent ces calomnies et vous "intoxiquent" non seulement à mon sujet, mais aussi et surtout sur des sujets beaucoup plus vitaux pour l’avenir de la Côte d’Ivoire, de l’Entente, de l’OCAM et de l’Afrique.


En ce qui me concerne, j’ai le plus profond mépris pour ces calomniateurs, car depuis 27 ans que je milite je n’ai eu que ma seule conscience pour juge. C’est ce respect suprême de moi-même qui m’a amené à affronter les mitrailleuses des troupes d’occupation anglaises, puis la police politique de Farouk de de Nasser. C’est dire que des gens de l’acabit de mes calomniateurs ne peuvent ni m’effrayer, ni me faire dévier de la voie que je me suis choisie.


Avant de terminer je voudrais vous dire encore tout mon espoir de vous ouvrir une enquête approfondie dont le résultat, j’en suis certain, vous amènera à vous rendre compte où sont vos véritables amis et vos véritables ennemis.


Dans l’attente, je vous prie d’agréer, Monsieur le Président, l’expression de mes sentiments déférents.


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