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U-003-084-001 - NOTES - classeur U - Fonds d'archives Baulin

U-003-084-001

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    seront disponibles sur le site en version iBook et en version Pdf dès septembre
    2009.
















Hebdo spécial du 15.4.77

L’URANIUM NIGÉRIEN : un ballon d’oxygène
Par Amadou Ousmane


Il nous faut savoir tirer profit de ce que la nature nous offre.


Lorsaue quelques jours seulement après son avènement au pouvoir en avril 1974, le lieutenant-colonel Seyni Kountché, parlait ainsi aux cadres nationaux réunis à Niamey personne alors n’avait pensé que c’était là le point de départ d’une croisade vers la recherche d’un contrôle toujours plus accru du Niger sur l’exploitation de ses ressources naturelles.


Ce n’est que quelques mois plus tard lorsque le Ministre des Finances présentant la loi de finances 1975 annonça que l’apport de l’uranium au budget national passait de 1 milliard en 1974 à 4 milliards en 1975 que l’on comprit la portée réelle de la déclaration du Chef de l’État.


Ainsi de manière discrète, sans tambours ni trompette, et surtout sans faire voler les structures existantes en éclats, la nouvelle équipe dirigeante a obtenu en quelques mois ce que la précédente n’avait pas obtenu en 7 ans d’interminables négociations.


UNE ÉCONOMIE CHANCELANTE


Pour le lieutenant-colonel Seyni Kountché et son gouvernement ce fut la consécration de quelques mois de sacrifices et de persévérance dans l’effort. La situation sociale et économique du pays n’était en effet guère brillante lorsque à l’aube de Pâques 1974 le lieutenant-colonel Seyni Kountché et ses hommes sautèrent à pieds joints dans la barque de l’histoire.


Conforté depuis 4 ou 5 ans à une sécheresse implacable qui a décimé le 4/5 du cheptel asséché les mares et le puits et réduit certains Nigériens à l’état de loque humaines, le pays tout entier se débattait alors contre la famine et la mort. Les 3 milliards supplémentaires venaient à temps, comme un ballon d’oxygène redonner du souffle à une économie déjà chancelante.


C’est donc le coeur joyeux et la foi revigorée que les Nigériens ont appris l’importante nouvelle.


Ce qui s’était passé entre temps traduit à souhait la volonté des militaires de mener le


pays sur les rails du progrès, en débarrassant l’économie de certaines contraintes politiques qui pesaient sur elle.


C’est dés le 22 avril, dans un important discours programme que le Chef de l’État proclama son intention d’obtenir pour le pays et cela grâce à ses ressources naturelles, des revenus plus substantiels.


Jusqu’alors, la France seule maîtresse du jeu parce que seul exploitant et seul acheteur, fixait unilatéralement le prix d’achat du minerai en vertu des accords franco-nigériens de 1961, et se contentait de verser chaque année une contrepartie de 1 milliard CFA.


"On nous faisait croire, explique aujourd’hui un haut fonctionnaire des Mines, que l’uranium bien qu’étant un produit stratégique n’était pas côté à l’extérieur. Pour cela on fixait son prix à 5.000 francs le kilogramme .


" De plus,poursuit-il, il y avait à l’origine, une très grosse anomalie. La SOMAIR, première société minière au Niger et dans laquelle l’État Nigérien ne détenait que 16,75 % du capital, traitait directement avec l’État. Or il est pour le moins aberrant qu’un organe politique tel un Cabinet ministériel discute de l’exploitation et de la commercialisation de minerai avec des organismes à caractère purement technique et commercial. "


DES NÉGOCIATIONS DIRECTES


Pour mettre fin à cette anomalie, le Conseil Militaire Suprême décida donc que les négociations sur la commercialisation de l’uranium ne se feraient plus sur des bases politiques d’État à État entre la République française et le Niger, mais sur des bases "exclusivement commerciales" entre la société exploitant et l’État nigérien. Mais le Nigériens qui ne sont pas des ingrats, sont reconnaissants vis-à-vis de la France qui a été le premier pays à avoir investi d’importants capitaux à la recherche et à l’exploitation des ressources du sous-sol nigérien.


"notre uranium appartient à ceux qui accepteront de creuser avec nous pour le trouver", dira le lieutenant-colonel Seuni Kountché.


On créa alors URANIGER à qui on transféra toutes les actions souscrites par l’État dans le capital social des sociétés et projets de recherche et d’exploitation de l’uranium existant au Niger.


dans le même temps le C.M.S. porta la participation de l’État au capital de la SOMAIR de 16,75 % à 33 %, renforça les mesures fiscales en instituant une redevance minière de 4,5 %, des droits de sortie de 1 %, un impôt sur les bénéfices industriels et commerciaux de 40,50 % et un impôt sur les revenus des valeurs mobilières de 16 %.


Mieux, les Nigériens décidèrent de fixer eux-mêmes le prix de leur uranium. Le hasard fit le reste : crise pétrolière, réévaluation des matières premières, réveil des projets nucléaires, tout cela fit tripler le prix de l’uranium pendant que le production enregistrait comme par enchantement une hausse régulière : 949 tonnes en 1973 ; 1.114 en 1974 ; 1.306 T. en 1975, et enfin 1.459,760 tonnes en 1976.


Et voici que - comme pour donner raison à l’adage selon lequel "c’est quand le social va que tout va" - des investisseurs affluant de toutes parts se pressent au portillon apportant leur caution en même temps que leurs capitaux à un régime et un pays qui en ont bien besoin. Le spectre de la famine étant écarté, les autorités nigériennes ne se trouvèrent que plus à l’aise pour concevoir avec de nouveaux partenaires une politique minière à long terme suffisamment réaliste pour donner au pays les moyens de se construire sans pour autant épuiser les réserves.


En ce mois d’avril 1977, le Nger ou du moins sa partie désertique est un vaste chan


tier où s’affairent, telles des guêpes maçonnes les chercheurs d’uranium. Ainsi, le Teguidan-Tessum à Ariit, d’in-Gail à Imouraren ou Agadez, Américains et Japonais, Français et Canadiens, Anglais et Iraniens, en tout une quinzaine de groupes étrangers se livrent une concurrence acharnée pour "localiser" les précieux gisements ou pour "enlever" des permis de recherche.


LES PREMIÈRES RECHERCHES


C’est en 1985 que débutèrent les premières recherches dans une plaine à l’ouest de l’Aïr. Le commissariat à l’ Énergie atomique (C.E.A) français entreprenait alors des recherches de minerais radio-actifs dans le style américain. Il lui fallut 10 ans pour découvrir en 1966 dans le bassin de Tin MersoÏ près d’Arlit, des concentrations d’uranium économiquement exploitables.


Deux ans plus tard fut créé la Société de Mines de l’Aïr (SOMAIR) qui réunissait dans un capital de 4.348.880.000 CFA les actionnaires suivant : État du Niger, Compagnie Française des Mines d’Uranium, Minatome, Mokta, Urengesell-Schaft (RFA) et la société italienne Agip S.P.A. L’exploitation ne commença qu’en 1971. Depuis la production et les ventes ont été les suivantes :



Année
1971
1972
1973
1974
1975
1976


Production
400 T.
869 T.
949 T.
1.114 T.
1.306 T.
1.459 T.760


Vente
400 T.
300 T.
1.090 T.
1.250 T.
1.400 T.
1.500 T. 346


Jusqu’à la fin de 1975 la totalité de la production était acquise par le C.E.A. La politique d’ouverture inaugurée par le C.M.S. ouvrit la voie à de nouveaux clients, Italiens et Allemands notamment.


Avec un chiffre d’affaires de 21 milliards CFA, la SOMAIR reste de loin la première entreprise nigérienne. Elle occupe environ 860 personnes dont 720 ouvriers et employés nigériens encadrés par 120 expatriés et une vingtaine de Nigériens dont un ingénieur.


SOMAIR est une société de droit nigérien dans laquelle l’État détient 33 % du capital. Elle est pour le moment la seule société exploitante.


Mais déjà pour passer du stade de la production à la vente, le Niger et le C.E.A avaient pris soin de "ménager leur monture".


Ainsi, dés 1970, ils concluaient un premier accord avec le consortium Japonais Overseas Uranium Resources Development Company Ltd (OURD) qui groupe une vingtaine de firmes second gisement situé à 10 kilomètres seulement au Sud-Ouest d’Arlit. Cela donna naissance le 12 juin 1974 à une seconde société  : la Compagnie Minière d’Akouta (COMINAK) au capital de 3,5 milliards CFA. URANIGER en détient 31 %, le C.E.A. 34 %, Ourd 25 % et la société espagnole Empresa Nacional del Umio S.A. (Enusa) 10 % .


La particularité de ce gisement est que le minerai, à l’inverse de celui d’Arlit, se trouve à quelque 250 mètres sous terre. Il faut donc creuser des galeries pour l’y extraire. On s’y emploie depuis 1975. La production débutera si tout va bien, le 1er septembre 1978 avec 600 tonnes. Mais elle est appelée à atteindre 2.00 tonnes en 1980. Il est prévu d’installer sur le carreau même de la mine une usine de traitement d’une capacité nominale annuelle de 600.000 tonnes de minerai pour une production de 2.000 tonnes.


En attendant, la COMINAK s’emploie à implanter les installations nécessaires à la totalité de ses besoins : bureaux, magasins, aires de stockage, dépôts de carburants, dépôts d’explosifs, laboratoires, centre de formation professionnelle, ateliers divers. Tout doit être apporté sur place, et comme à Arlit une villa nouvelle avec toutes les commodités a déjà surgi de terre : Akokan. Elle aura au ba mot 5.000 habitants en 1980, date à laquelle la COMINAK emploiera un effectif de 500 à 600 personnes.


MULTIPLICATIONS DES PARTENAIRES


Depuis trios années, le Niger s’emploie donc à multiplier ses partenaires, en particulier dans le domaine de la recherche. Déjà 15 groupes étrangers de neuf pays y participent. Il s’agit de : Uran, Agip, Ourd, Enusa, British Nuclear Fuel Ltd, Conoco et Esso Mineral des U.S.A., Pan Ocean Oil Ltd du Canada, Japan Petroleum Trading Company et Power Nuclear Fuel Development Corporation du Japon et enfin L ’Organisation de l’ Énergie atomique de l’Iran.


Les travaux de recherche qui se poursuivent activement parce que vivement encouragés par les autorités nigériennes, ont permis de mette en évidence plusieurs autres gisements dont le plus important se trouve dans la région d’Imouraren ( 120 km au nord d’Agadez et 80 km au sud d’Arlit). Ce gisement découvert par le C.E.A. est de la "taille" de ceux d’Arlit et d’Akouta. Il est en cours de développement par une association de recherche créé en 1974 entre URANIGER, C.E.A. et Conoco. Les recherches complémentaires sont financées par C.E.A. et Conoco. Elles doivent être terminées en 1979.


Sur le vaste permis du Djado - 100.000 km2 - qui jouxte les frontières libyenne, algérienne et tchadienne, la Société des Mines du Djado créé en 1974 réunit URANIGER, C.E.A., Uran et P.N.C. Des indices sérieux ont été découverts.


Le permis Afasto-Ouest  : selon le ministère des Mines, "des espoirs de découverte et d’exploitation de l’uranium sont réels dans cette zone" ? C’est pourquoi 3 milliards de francs y ont été investis. Les maitres d’oeuvre sont URANIGER bien sûr, C.E.A. Ourd et Enusa. D’autres recherches sont actuellement entreprises autour de l’Aîr sur les permis délivrés à Esso Minerais, Pan Ocean, Japex.


C’est donc au total une dizaine de gisements qui seront mis en exploitation dans les


prochaines années... On a eu raison de dire que le Niger est un Canada qui s’ignore.


UN GRAND EXPORTATEUR


Déjà en 1974, avec 1.200 tonnes d’uranium, il se plaçait au cinquième rang des producteurs mondiaux après les États-Unis (8.800), le Canada (3.240), l’Afrique du Sud (2.711) et la France (1.610), avec environ 6 % du total mondial (18.461 tonnes).


Ses capacités de production "prévues pour 1978" sont chiffrées à 2.200 tonnes (5 % du total Mondial, quatrième rang). Elles passeront en 1980 à 4.000 tonnes (7 %) et peut-être en 1985 à 8.000 tonnes.


Les réserves elles, étaient estimées en 1975 à 50.000 tonnes d’uranium. Mais le pays est vaste et les recherches continuent.


Le Niger peut donc s’estimer "raisonnablement assuré". "Mais à condition précisent les spécialistes, de mener une politique minière à long terme".


A cela, le lieutenant-colonel Seyni Kountché a déjà répondu :


"A chaque trou creusé, doit se substituer une réalisation de développement concrète et profitable à notre peuple".


Première manifestation concrète de cette volonté : les sociétés qui participent à l’exploitation et la recherche de l’URANIUM ont accepté de financer la réalisation d’une route Tahoua-Arlit (650 km) dite "Route de l’Uranium" qui relierait les zones minières du Nord et le Sud économique du pays. Le coût est estimé à 25 milliards CFA qui seront financés à 90 % par les partenaires sous forme de crédits à long terme et à taux favorables.


Mais le Niger, s’il sait qu’il peur compter sur ses partenaires pour l’aider à creuser, pense aussi à se donner dés à présent les moyens de maitriser pour un meilleur contrôle cette nouvelle technique.


A cet effet, une Écoles des Mines de l’Air s’est ouverte il y a un peu plus d’un an à Agadez. cette école dont l’installation complète a nécessité un investissement d’un milliard de francs CFA formera des techniciens nigériens des Mines et de la Géologie.


SUR LA VOIE DE LA CROISSANCE ÉCONOMIQUE


Lorsqu’on sait que le kilo d’uranium nigérien qui était vendu jusqu’en 1974 à 5.000 F. est vendu aujourd’hui à 20.000 francs.


Lorsqu’on sait que les revenus de l’uranium ont déjà permis au Conseil Militaire Suprême dont le cheval de bataille est la justice sociale de relever les salaires de 10 à 25 % selon les cas, d’augmenter le taux du S.M.I.G. de 40 % et de réduire de 50 % l’impôt du minimum fiscal...


Lorsqu’on sait que les revenus de l’État provenant de l’uranium sont passés de 1 milliard en 1974 à 4 milliards en 1975, puis 8 milliards en 1976 et qu’ils devraient augmenter beaucoup plus encore en 1978 quand la deuxième société, la COMINAK sera mise en production, on ne peut que conclure en souhaitant, comme le lieutenant-colonel Seyni Kountché "que l’uranium nous fasse franchir l’étape décisive de la croissance économique qui permettra d’apporter enfin à notre peuple la joie et le bonheur auxquels il a toujours aspirés".


AMADOU OUSMANE

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