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U-003-114-002 - NOTES - classeur U - Fonds d'archives Baulin

U-003-114-002

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  • Des interviews exclusives de Dja-Apharou ISSA IBRAHIM, ami et confident de Jacques Baulin, responsable par donation de l’intégralité des documents constituant le fond, et président de l’association sont actuellement publiées dans la rubrique présentation.

  • Les trois ouvrages de J. Baulin : Conseiller du président Diori, La politique africaine d’Houphouët-Boigny et La politique intérieure d’Houphouët-Boigny
    seront disponibles sur le site en version iBook et en version Pdf dès septembre
    2009.
















- LE MONDE - 8-9 mai 1977 . . .

" INDÉPENDANT
MAIS RESPONSABLE "


( Suite de la page 7 )


Pourquoi le Venezuela n’est-ils pas membre du groupe des pays non-alignés, alors qu’il défend avec vigueur la cause du tiers-monde ?


- Nous avons, jusqu’à présent, préféré conserver notre position d’observateur auprès des non-alignés. Nous avons, avec ces pays beaucoup de points communs. Mais nous pensons que notre situation actuelle est celle qui nous permet de mener, de la façon la plus satisfaisante, la politique que nous souhaitons, et nous n’envisageons pas de changer. Mais notre amitié et nos points communs avec ces pays sont incontestables.


Vous souhaitez demeurer un pays du tiers-monde pas tout à fait comme les autres...


- Non. Nous voulons surtout demeurer totalement indépendant vis-à-vis des blocs de pays. Mais cela n’empêche pas le développement de lignes d’action commune.


Le système économique latino-américain ( SELA) n’est-il pa, jusqu’à un certain point, en opposition avec l’ Organisation des États américains (O.E.A.) ?


En aucun cas ! Le SELA est un système purement complémentaire de ce qui existe déjà. Ce mécanisme original, d’une conception très souple, n’est incompatible ni avec l’ O.E.A., ni avec le pacte andin, ni avec l’ Association américaine de libre-échange (ALALC), ni avec le marché commun centre-américain. L’ O.E.A. a ses objectifs propres, et nous sommes de ceux qui pensent que cette organisation est nécessaire, qu’elle a sa place en Amérique latine. Il faut seulement qu’elle se rajeunisse, qu’elle se transforme en une organisation moins conventionnelle, moins académique dans sa façon de traiter les problèmes de l’hémisphère - en particulier les problèmes sociaux et économiques.


Pourtant, en membre important de la famille latino-américaine - je me réfère à Cuba - n’en fait pas partie...


- L’idéal serait que Cuba revienne, un jour, au sein de l’ O.E.A. Il faut que l’organisation soit le plus complète possible.


Ces derniers mois, le Venezuela a reçu de nombreux leaders socialiste, ou sociaux-démocrates. En mai dernier, il y a eu une rencontre de l’ Internationale socialiste à Caracas. Le président Perez lui-même a assisté, en novembre dernier à Genève, à la réunion de l’ Internationale. Tout ceci correspond-il à un plan de gouvernement ou répond-il simplement aux affinités idéologiques du parti dirigeant, l’ Action démocratique ?


" Il y a, d’abord, le désir de nous rapprocher de tous les secteurs démocratiques qui ont des affinités avec ce que nous faisons au Venezuela. Il y a donc ce que vous avez décrit, un intention essentiellement politique : nous considérons comme important le fait que les leaders sociaux-démocrates connaissent un peut mieux les questions latino-américaines. De surcroit, nous croyons que nombre des problèmes posés par l’actuel déséquilibre de l’ordre économique mondial pourraient trouver plus facilement une solution si les leaders sociaux-démocrates européens avaient des positions plus actives, plus vigilantes sur ce sujet."


" D’une façon plus générale, nous désirons développer nos relations avec les leaders démocrates du monde entier, et pas seulement de l’ Europe. A la réunion de Genève dont vous avez parlé, il y avait aussi le président Senghor, à qui j’ai officiellement rendu visite depuis lors, en décembre dernier. C’était la première fois qu’un ministre des affaires étrangères du Venezuela se rendait en Afrique. Or nous pouvons avoir, avec certains pays africains, des relations très aisées, en raison de notre commune culture latine. J’ai parlé de cela avec M. Senghor - l’un des hommes les plus intelligents, les plus agréables qu’il m’ait été donné de rencontrer, un grand homme d’ État, de surcroit."


" Notre intérêt pour l’ Afrique ne fera que grandir, car l’océan Atlantique devient, devient, chaque jour davantage, un lac dont ce continent occupe une rive, et nous celle d’en face."


" Il est évident, de surcroit, que, pour tout ce qui touche au tiers-monde, les convergences entre eux et nous sont nombreuses. En ce moment, je m’efforce de lire tout ce que je peux sur l’ Afrique, qui demeure pour nour nous Latino-Américains, un monde largement inconnu. Dans las années à venir, nous allons devoir créer des liens très étroits avec ce continent et aussi avec l’ Asie."


Propos recueillis par
JEAN-PIERRE CLERC

POLITIQUE LE VENEZUELA


A deux pas de la très belle place Simon Bolivar - au coeur de l’unique quartier de Caracas épargné par la pioche sacrilège des démolisseurs, - il faut passer la grille en fer forgé d’un palais néo-classique aux murs étincelants de blancheur, dominé par une coupole dorée. On se retrouve dans une cour fraiche, plantée de palmiers. De graves messieurs en arpentent les allées de marbre ; d’autres devisent assis sur des bancs ; d’autres encore, debout participent à des discussions animées. Ce sont des députés et des sénateurs, élus librement par les citoyens du pays. Ce spectacle, banal en

Une plante
fragile
et
pourtant
vivace


Europe, fait aujourd’hui du Venezuela une des " bêtes curieuses " d’un continent livré, dans sa quasi-totalité, a toutes les formes - civiles et militaires - de l’oppression.


Phénomène récent dans un pays longtemps dominé par la cohorte des tyrans et tyranneaux dont Bolivar avait prophétisé l’avènement ; la démocratie vénézuélienne est aujourd’hui résumée par l’âpre lutte pour le pouvoir que se livrent le parti majoritaire, Action démocratique, et la formation social-chrétienne COPEL, tandis qu’au sein d’une gauche divisée, le Mouvement vers le socialisme (MAS) apparait de plus en plus comme une troisième force crédible.


Le système actuel est une plante fragile ; trop de citoyens peuvent, à bon droit, s’en considérer comme de simples spectateurs ; le fonctionnement même du parlementarisme commence à montrer des " ratés " inquiétants. Mais, à l’inverse, la démocratie vénézuélienne a montré sa force en se révélant capable d’attirer les extrêmes dans le jeu ; d’anciens guérilleros, comme des sympathisants de la dictature déchue ne sont-ils pas, aujourd’hui, députés ?

Action
démocratique ;
la ténacité
d’un homme


Le parti Action démocratique (A.D.), qui a dominé les trois dernières décennies de la vie politique du Venezuela, au pouvoir ou en exil, dans la clandestinité ou dans l’opposition, c’est d’abord un homme, tenace et courageux : Romulo Betancourt.


Libéral dans l’âme, homme de gauche ayant évolué vers des positions plus modérées par pragmatisme, démocrate intransigeant refusant tout compromis avec les totalitarismes, de droite ou de gauche, adversaire farouche des dictatures militaires, dirigeant réaliste soucieux d’accélérer le développement de la nation en négociant avec la " puissance " de l’étranger : Romulo Betancourt est une figure prestigieuse de la classe politique latino-américaine.


Sans lui, le Venezuela ne serait peut-être pas aujourd’hui l’un des derniers refuges de la démocratie représentative en Amérique latine, Romulo a traversé la vie une éternelle pipe vissé au coin de ses lèvres minces, le regard incisif et volontiers ironique derrière les grosses lunettes à monture d’écaille, animé par la seule rage de faire triompher ses idées politiques. Homme de passion généralement contenue, mais capable d’éclats et de colères, il a bien sûr le défaut de ses qualités : un caractère entier, peu porté à la conciliation et à la prudence.


Leader étudiant luttant, dans les années 30, contre la dictature de Juan Vicente Gomez, le " tyran des Andes " ; chef de parti forgeant dans l’ombre les structures de l’organisation ; président civil, en 1945, d’une junte de gouvernement aux côtés de deux militaires ; dirigeant banni mais indompté, contraint d’entreprendre une traversée du désert qui a duré dix ans ; président de la République, de 1959 à 1964 ; leader suprême et respecté d’un parti de gouvernement qu’il continuait de " conseiller " même de ses retraites étrangères ; dans toutes ces étapes de sa vie politique, Romulo Betancourt est resté égal à lui-même. Cordial et simple dans ses relations personnelles, inflexible sur les principes.


L’âge et la maladie ont tassé la silhouette frêle, mais non pas le désir d’être l’inspirateur et le guide. Admiré et critiqué, contesté au sein même d’ Action démocratique, il en reste, malgré tout, le numéro un indiscutable. Il est tout-à la fois " père " de la patrie et "pontife" d’un parti qui a très largement contribué à asseoir un État démocratique et libéral dans une terre propice à l’épanouissement des caudillos. Avec le recul, on voit bien que Romulo, qui admirait de Gaulle, mais aussi Mendes France, n’a été vraiment à l’aise que dans le drame et les heures difficiles.


18 octobre 1945 : le "révolution d’octobre" du Venezuela, qui propulse, pour la première fois, Romulo au premier rang, est plus qu’une simple "conspiration" entre Action démocratique, seule formation d’audience nationale à l’époque, et un groupe d’officiers libéraux. C’ets une "suite" logique de la deuxième guerre mondiale qui, dit Roosevelt, "a été faite pour en finir avec le totalitarisme sur toute la planète". Appartenant à la génération de 1928, qui a lutté contre la dictature de Gomez membre de l’Orve (Organisation révolutionnaire vénézuélienne), il fonde, après avoir rompu avec les communistes, la parti démocratique national (P.D.N.), esquisse de l’ Action démocratique, crée en 1940. En trois ans, de 1945 à 1948, Betancourt et l’A.D. définissent les principes de base d’une politique économique et sociale qui sera reprise après 1958.


24 novembre 1948 : l’armée prend le pouvoir, chasse l’ Action démocratique. Ami du Dominicain Juan Bosch, du Costaricien Figueres, du Péruvien Haya de la Torre, Romulo commence son troisième exil. Le dictateur Perez Jimenez poursuit impitoyablement l’A.D., clandestine, dont plusieurs dirigeants sont assassinés. Betancourt, persuadé qu’il reviendra au pouvoir, prépare, en liaison avec les réseaux de l’ombre, la chute du régime militaire.


23 janvier 1958 : Perez Jimenez est renversé. Le 7 décembre 1958, Romual Betancourt est élu président de république. Réforme agraire ; poursuite du développement basé sur les ressources de l’ "or noir" ; progressive et lente prise en main par l’ État de l’industrie pétrolière ; rédaction d’une nouvelle Constitution démocratique promulguée en 1961 ; mais aussi conflits aigus avec l’aile révolutionnaire de l’ Action démocratique, hostile à la ligne de la "vielle garde" regroupée autour de Romulo ; extension de mouvements de guérilla d’inspiration castriste ; émeutes ; sanglantes insurrections armées de Carupano et Puerto-Cabello en 1962 ; période dramatique, violente, où Betancourt apparait comme un "homme à poigne", résolu à se battre jusqu’au bout, mettant hors la loi le parti communiste et le MIR (Mouvement de la gauche révolutionnaire) soutenu par Cuba. Le 24 juin 1960 il a échappé par miracle à la mort, victime d’un attentat terroriste ourdi par le dictateur dominicain Trujillo. Aux élections présidentielle de décembre 1963, Romulo réussit à imposer "son candidat" Raul Leoni, compagnon des premiers jours, qui l’emporte avec 33 % des voix et prend ses fonctions en mars 1964.


Comparée à celle de son prédécesseur, la présidence de Leoni apparait presque sans histoires. Le contexte, interne et extérieur, avait changé. Battue, la guérilla d’extrême gauche se replie, accepte la main tendue par les dirigeants. L’ Action démocratique, restée au pouvoir, demeure le parti dominant ; mais elle doit affronter un parti social-chrétien (COPEI) en progrès, dont le leader, Rafael Caldera, est élu à la présidence en 1968.


La formation de Romulo Betancourt reconquiert le pouvoir en 1973 avec l’élection de Carlos Andres Perez, ancien secrétaire particulier de Betancourt, qui a repris avec détermination la politique de nationalisation du pétrole, esquissée en 1945 par le premier gouvernement A.D, et poursuivie après 1958 par tous les gouvernements. Une scène symbolique, émouvante, illustre cette boucle qui se referme : le 1er janvier 1976, près du lac de Maracaibo, la nationalisation de l’industrie pétrolière vénézuélienne est solennellement proclamée. Le drapeau vénézuélien est hissé au dessus du premier puits de pétrole découvert dans cette région. Carlos Andres préside. Mais Romulo est là, en costume blanc, silencieux, méditatif


Permanences, triomphes, erreurs ou défaites : l’ A.D. ressemble bien à son fondateur, et son histoire se confond avec celle du Venezuela moderne. Parti de personnalités, sinon de notables, dont les principaux sont, précisément, ceux qui ont entouré Romulo depuis le début : Pablo Perez Alfonso, créateur de l’ OPEP, José Antonio Mayobre, ancien président de la CEPAL, Gonzalo Barios, Carlos Andres Perez...


Parti polyclassiste, s’appuyant sur la paysannerie, les " cols blancs " et le prolétariat urbain, A.D. suit une ligne réformiste et progressiste. Une social-démocratie vénézuélienne ? Sans doute, mais bien des nuances distinguent les " adecos " des sociaux-démocrates européens.


L’un des plus grands succès de l’ A.D., à l’intérieur, est d’avoir réussi à mettre une armée traditionnellement turbulente au service de l’ État. Au soir de sa vie, Romulo peut être satisfait : le Venezuela est aujourd’hui l’une des rares et authentiques démocraties en Amérique latine. L’arrivée, à la Maison Blanche, d’un président démocrate est peut-être aussi, pour lui une raison d’espoir.


MARCEL NIEDERGANG

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