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U-006-132-002 - NOTES - classeur U - Fonds d'archives Baulin

U-006-132-002

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  • Les trois ouvrages de J. Baulin : Conseiller du président Diori, La politique africaine d’Houphouët-Boigny et La politique intérieure d’Houphouët-Boigny
    seront disponibles sur le site en version iBook et en version Pdf dès septembre
    2009.



















Page 44 - LE MONDE - 18 décembre 1976

LA VIE ÉCONOMIQUE ET SOCIALE




LA HAUSSE DU PÉTROLE DÉCIDÉE A LA CONFÉRENCE DE L’OPEP ET SES CONSÉQUENCES




Pour la France une dépense supplémentaire de 4,7 milliards de francs


Les décisions prises à Qatar en ordre dispersé par les pays exportateurs de pétrole se traduiront de toute façon par une sensible aggravation de la balance commerciale française que l’on peut chiffrer approximativement à un peu moins de 5 milliards de francs en année pleine.


En 1976, la France aura importé quelque 113 millions de tonnes de pétrole brut une somme globale de 54 milliards de francs. De ce chiffre, il faut déduire les réexportations de produits raffinés (3 milliards), soit un solde net déficitaire pour la balance pétrolière de 51 milliards de francs. Pour déterminer très exactement l’impact des décisions des pays producteurs, il faut introduire de nombreux paramètres : évolution de la consommation et surtout variations du cours du dollar - ou plutôt du franc par rapport à la devise américaine. L’administration estime qu’en 1977, compte tenu d’une croissance modeste de la production intérieure brute, et des résultats attendus de la campagne pour les économies d’énergie, la France consommera à peu près la même quantité de pétrole que cette année. En supposant que le cours moyen du dollar reste identique, une hausse uniforme de 10 % des prix du brut le 1er janvier 1977 aurait coûté 5,1 milliards de francs de plus à la France. Mais les choses ne sont pas, cette fois, aussi simples.
La scission au sein de l’OPEP et les augmentations différenciées qui en découlent vont - à moins qu’on ne parvienne dans les prochains jours à un compromis, - singulièrement compliquer les choses.


L’Arabie Saoudite est de loin le premier fournisseur de pétrole brut de la France. Les importations françaises, qui ont considérablement augmenté ces dernières années, dépassent les 40 millions de tonnes, et représentent environ 35 % du total de nos achats. Les livraisons en provenance des Emirats arabes unis (Abou-Dhabi essentiellement) avoisinent les 12 millions de tonnes, soit un peu plus de 10 % au total.



La répercussion sur les prix de détail : entre 0,3 et 0,8 %


Ces deux membres de l’OPEP ont décidé de n’augmenter le prix de leur brut que de 5 % au 1er janvier.
Les onze autres membres, majorent leurs prix de 10 % au début de l’année puis de 5 % au 1er juillet, ce qui correspond en fait à une hausse moyenne sur l’année de 12,7 %. Conséquence : le coût supplémentaire de nos importations en provenance d’Arabie Saoudite et des Emirats arabes unis sur l’ensemble de l’année 1977 serait d’environ 1,15 milliard de francs et le renchérissement de nos achats auprès des autres membres de l’OPEP s’élèverait à 3,5 milliards de francs, soit au total entre 4,6 et 4,7 milliards de francs. La facture probable du pétrole ne serait donc que très légèrement supérieure aux 55 milliards de francs, plafond fixé par le gouvernement.


Quel effet aura la hausse du prix du brut sur les prix de détail mesurés par l’indice de l’INSEE et la croissance économique en France ? La ponction externe que représente sur la richesse nationale une hausse moyenne d’un peu moins de 10 % a un effet dépressif sur la croissance qu’on peut évaluer à environ 0,5 ou 0,6 % et un effet inflationniste qu’on estime à 0,3 ou 0,4 %, si les pouvoirs publics - ou les chefs d’entreprise - empêchent les effets induits de louer (répercussions sur les salaires de la hausse de l’indice, puis des salaires sur les prix par alourdissement des coûts de revient, etc.) En revanche, jouent les effets induits, la hausse de l’indice des prix serait de 0,8 % environ ; il en serait de même pour les salaires.


Ainsi, la croissance en 1977, qui, selon les estimations officielles (comptes prévisionnels de la nation) devait atteindre 4,8 % en volume serait ramenée à 4,2 %. La hausse des prix de détail que M. Barre entendait ramener à 6,5 % en 1977, atteindrait 6,8 %
si l’on exclut les effets indirects, ou à 7,3 à 7,5 % si jouent ces effets indirects.



Relèvement immédiat des tarifs des produits pétroliers ?


Pour le gouvernement français, il va s’agir maintenant de prendre un certain nombre de décisions. Quand va-t-on répercuter dans les prix aux consommateurs les décisions de Qatar, comment modulera-t-on la hausse selon les différents produits (fuel domestique, carburant, les tarifs du fuel industriel étant théoriquement libres et suivant l’évolution des cours du marché international).


Sur le premier problème, il existe deux écoles de pensée : les uns font valoir que le pétrole brut n’arrivera en France aux nouveaux tarifs qu’environ quarante-cinq jours après leur application, compte tenu des délais de transport. La répercussion sur les prix aux consommateurs ne devrait donc s’appliquer qu’autour du 15 février. Pour les autres, il faut augmenter les tarifs français dès le 1er janvier, et ce pour deux raisons : d’une part, pour profiter de l’impact psychologique, d’autre part, pour donner aux compagnies pétrolières, notamment aux deux françaises, Elf-Aquitaine et la Compagnie française des pétroles, un ballon d’oxygène.
Celles-ci estiment, en effet, qu’elles sont quelque peu lésées par les prix actuellement en vigueur sur le marché intérieur puisque le cours de référence retenu par l’administration lors de la dernière augmentation est de 4,89 F, alors que la devise américaine a évolué toutes ces dernières semaines autour de 5 F.


Quant à la modulation de la hausse selon les produits, elle n’est pas encore déterminée. Cependant, on peut penser que les carburants seront plus touchés que le fuel domestique.


Une répercussion mécanique de la hausse du brut au 1er janvier (+ 5 % pour l’Arabie Saoudite et les Emirats et 10 % pour les autres pays de l’OPEP) se traduirait pour le consommateur par une majoration des tarifs des carburants d’environ 5 centimes, et d’un peu moins de 4 centimes pour le fuel domestique.
Ces chiffres ne sont évidemment qu’indicatifs.


L’industrie et E.D.F. (principal consommateur de fuel industriel) subiront de leur côté une hausse un peu inférieure à 10 % des prix du fuel industriel. Les secteurs les plus touchés seront les ciments et chaux (deuxième consommateur de fuel industriel après E.D.F.), la papeterie, l’industrie du verre, celle des matériaux de construction. L’impact sur les prix de revient de ces branches tournerait autour de 1 %.




JEAN-MICHEL QUATREPOINT.







La polémique entre le parti communiste et les compagnies pétrolières rebondit


"M. Marchais raconte n’importe quoi et trompe les Français", écrit M. Demargne, président de l’union des chambres syndicales de l’industrie du pétrole, dans une lettre ouverte adressée au secrétaire général du P.C.F. et publiée en première page par l’Humanité dans son édition du 17 décembre. Le président de l’U.S.C.I.P. entend ainsi répondre aux propos tenus, ces derniers jours, par M. Marchais accusant les compagnies de réaliser 4 milliards de francs de superprofits.


"Tout le monde connaît le prix du pétrole brut (arabe léger) qui sert de référence à l’OPEP : 11,51 dollars par baril, soit 11,51 x 7,35 x 5 = 423 F par tonne", note M. Demargne. "A l’autre bout, poursuit-il, nous connaissons également le prix du pétrole brut importé en France, qui fait l’objet de déclaration par les sociétés de raffinage et d’un contrôle par la direction générale des douanes. Ce contrôle a fait apparaître un prix CAF
Prix à la livraison, transport et assurance compris.moyen à l’entrée en France de 468,91 F par tonne pour octobre 1976. Le fret moyen étant de 42 F par tonne, le coût du brut entré en France a donc été de 427 F par tonne pour la moyenne des pétroles importés au cours de ce mois."


"Pour tout esprit normalement constitué, conclut M. Demargne, il y a une remarquable coïncidence entre ces deux prix, surtout lorsque l’on sait que le pétrole OPEP représente 90 % de nos approvisionnements."


Dans sa réponse, M. Georges Marchais assure que "dans sa lettre, M. Demargne donne un prix de référence de 423 F par tonne. Mais ce prix n’est pas le prix réel. Il ne constitue que la base de référence pour la fiscalité dans les pays producteurs. Je réaffirme que le coût réel d’accès au pétrole brut des trusts étrangers est inconnu".


Estimant ensuite que M. Demargne ne répond pas en parlant du prix moyen à des interrogations sur le prix demandé par les sociétés étrangères à leurs filiales, M. Marchais maintient également "que les trusts étrangers opèrent un détournement que des études sérieuses (...) permettent d’évaluer à 400 milliards d’anciens francs".
Et de conclure :"Il y a donc bien un racket des trusts pétroliers qui rançonnent le pays au détriment du niveau de vie de sa population et de l’équilibre de sa balance commerciale."



A TF1, le 13 janvier

DÉBAT ENTRE MM. FOURCADE ET MARCHAIS


L’émission d’information de TF 1 "L’événement" communique : Le débat entre M. Marchais, secrétaire général du P.C., et M. Fourcade, ministre de l’équipement, et qui traitera des problèmes du pétrole, aura lieu le jeudi 13 janvier 1977 dans le cadre de l’émission "L’événement".



Les pays producteurs divisés



(Suite de la première page.)


Les plus virulents sentant la main américaine planer sur la conférence, envisageaient même de ne pas accepter de descendre en dessous de 12 %. Mais l’impasse alors ne semblait pas différente de celle que connaît régulièrement l’OPEP.
"Nous sommes très proches de la situation de Vienne", affirmait même, lors d’une conférence de presse, le Dr Amouzegar, ministre iranien du pétrole.



A la différence de Vienne


A Vienne, en septembre 1975, l’Iran avait en effet été favorable à une hausse de 20 %, tandis que l’Arabie Saoudite prônait, comme aujourd’hui, le "gel" des prix. Le taux d’augmentation finalement retenu avait été de 10 %, à égale distance du "gel" de M. Yamani et des 20 % de M. Amouzegar.
A Doha, l’intransigeance du ministre saoudien a surpris tout le monde.


Alors qu’il y a deux semaines encore il affirmait pouvoir accepter une hausse de 10 % et avoir du mal à s’opposer à une augmentation décidée par les autres membres, son manque de souplesse, à Doha, est apparu incompréhensible à beaucoup. "Rien dans l’économie mondiale n’a changé à ce point en quinze jours que ce qui était tolérable alors ne le soit plus aujourd’hui", a souligné M. Amouzegar.


Le taux de 5 % choisi par l’Arabie Saoudite peut aussi surprendre. Il y a moins d’un mois, le ministre du pétrole saoudien avait déclaré à Business Week : "Si nous décidons une augmentation située entre 3 % et 6 %, il y aura une autre hausse des prix de facto sur les marchés dont les compagnies seront les bénéficiaires." La hausse prônée par l’Arabie Saoudite est en effet celle qu’a connue le marché sous la pression de la demande, ces trois derniers mois. Mais le plus étonnant reste que le premier exportateur du monde ait pris le risque de violer la méthode habituelle de l’OPEP, l’unanimité qui résultait toujours d’un compromis entre thèses diverses et qu’il ait ainsi manifesté nettement un comportement léonin.



Quelles conséquences sur le marché ?


Les onze autres pays - l’Arabie Saoudite étant, en toutes circonstances, suivie par les Emirats arabes unis - ont donc refusé de se plier aux volontés du plus puissant d’entre eux. Pour manifester que la hausse ne devait pas se faire à l’encontre des pays en voie de développement, ils ont pris soin d’adopter le principe du versement annuel d’une importante somme forfaitaire - on parle de 800 millions de dollars - au Fonds d’aide de l’OPEP aux pays pauvres (dont l’Arabie Saoudite est, jusqu’à présent, le plus gros donateur) et d’envisager leur participation au Fonds de stabilisation des matières premières, dont la création avait été envisagée à Manille en janvier, puis à Nairobi en mai.


Comment l’OPEP va-t-elle réagir à ce système de double prix ? Le chef de la délégation vénézuélienne, M. Hernandez-Acosta,
affirmait, dans la nuit du 16 au 17 décembre, que cela serait supportable, et que les points de vue se rapprocheraient peut-être rapidement. L’Arabie Saoudite et les Emirats arabes unis assurent le tiers des exportations de l’OPEP.


Qui va bénéficier de la ristourne de 5 % qu’ils consentent ? Les compagnies ? M. Yamani a affirmé aux autres délégations qu’il mettrait au point un système tel qu’il n’en soit rien. Seront-ce les Etats-Unis, largement importateurs de "brut" saoudien, et qui, seuls peut-être avec l’Allemagne fédérale et le Japon auraient été à même d’absorber une plus forte hausse ?
Surtout, le poids pétrolier de l’Arabie Saoudite ne risque-t-il pas d’obliger les autres pays membres à s’aligner sur ces prix ?
Le principal producteur du Golfe peut aisément accroître sa production de trois millions et demi de barils par jour. Cela "casserait" le marché et vraisemblablement l’OPEP. Le cheikh Yamani se serait engagé auprès de ses collègues à ne pas dépasser les huit millions et demi de barils par jour, production moyenne de janvier à septembre 1976. Mais vendredi, au cours d’une conférence de presse, M. Yamani a déclaré que "le marché seul décidera à quel niveau se fixera la production" de l’Arabie Saoudite. La phrase est ambiguë, mais lourde de menaces.


"Cette réaction des onze pays est saine, commentait un délégué algérien. Elle preuve qu’un seul d’entre eux, si important soit-il, ne peut pas dicter sa loi aux autres." Il y a dans ces paroles une large part d’espoir.


Une brèche a été ouverte l’OPEP n’a pas été brisée ; en s’engageant à respecter certaines règles, l’Arabie Saoudite a évité de se couper d’un monde arabe sur lequel elle se sent de plus en plus une vocation paternaliste.
Mais une brèche a été ouverte dans l’Organisation des pays exportateurs de pétrole. L’évolution du marché dans les mois qui viennent dira si elle peut ou non être réduite.



BRUNO DETHOMAS.




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